L’étape suivant de notre parcours était Zion National Park – un théâtre naturel dont les falaises, taillées par le temps, montent vers le ciel comme de véritables cathédrales. Nous avons réservé deux journées à la visite de ce lieu, et il faut dire que nous avions de la chance avec la séquence des sentiers retenues – en effet, comme l’on voit sur mes images, la lumière, changeante et presque vivante, sculpte chaque heure un nouveau décor.
À l’aube, c’est la lumière en contre-jour qui souligne les contours de ce sanctuaire minéral, et les aiguilles verts des pins paraissent presque impondérable dans leur transparence translucide. Directement vis-à-vis, les formations montagneuses de grès rouge brillent au soleil et offrent une immense palette de couleurs comprenant tous teints roses et orangés imaginables, comme si on rallumait patiemment les braises d’un immense foyer rocheux.
Bien qu’on y était au début du mois d’avril, il fallait déjà coûte que coûte éviter la chaleur du midi – et je ne veux surtout pas savoir jusqu’à quelle dégrée les températures montent en juillet ni en août … On a repris notre parcours vers trois heures, et sur mes images on voit bien l’effet donné par la lumière encore quasiment verticale au début de l’après-midi – les immenses parois, lisses par endroits et striées ailleurs, y ressortent quand même assez volumineux grâce au relief sculpté par de millions d’années d’érosion, souligné par les ombres.
Au crépuscule, les ombres violettes glissent lentement dans le canyon, enveloppant le paysage d’une douceur inattendue – et de lors, les falaises du canyon offrent à chaque regard une palette renouvelée: les sentiers serpentent entre les parois de grès rouge dont les teints vont de l’ocre au pourpre, tandis que le feuillage des arbres reste d’un vert plutôt froid et procure, visuellement, une sensation du contraste due à l’effet de la confrontation des couleurs opposées.
Au fond des gorges monumentales coule la Virgin River – témoin silencieux de la brute puissance de la nature, ce ruisseau d’eau turquoise paraît tout fragile comparé à l’immensité minérale qui l’entoure de deux côtés. Pourtant, déjà depuis des millénaires, il façonne patiemment les entrailles du parc, et son murmure constant accompagne le visiteur, qu’il marche au long de ses rives ombragées ou qu’il s’engage dans les montées des roches.
Bien évidemment, les voyages avec un enfant impliquent ses limitations – nous n’avons donc pas pu explorer Narrows, le passage étroit où le sentier devient rivière et où les parois se rapprochent jusqu’à ne laisser qu’un ruban de ciel. L’ascension d’Angels Landing qui confronte le marcheur à la verticalité la plus spectaculaire ne nous étais pas possible non plus.
Pourtant, je crois que nous avons réussi à ressentir l’essentiel du parc – la coexistence entre force brute et fragilité subtile. La nature n’est pas seulement un décor – elle vous enveloppe, émerveille et écrase par l’envergure de ces paysages ! … Le parc mêle la puissance sculpturale de ses reliefs à une sérénité presque spirituelle, comme si ces murs de grès contenaient une sagesse ancienne. On s’y sent minuscule devant l’immensité des falaises, mais paradoxalement plus vivant que jamais.
C’est un lieu où l’on goûte à une forme de paix que seule l’ampleur du monde sauvage peut vous faire sentir …